A
l'occasion des attentats qui ont endeuillé notre pays, nous avons vu
des hommes rester fidèles à leur devoir d'état au péril de leur vie. Je
pense ici particulièrement au colonel Beltrame.
L'émotion
qu'ont suscitée ces épisodes de courage nous rappelle que, pour nous
chrétiens, bien au-delà des héros de la Cité (déjà admirables), nos véritables héros doivent être les saints. Eux aussi ont tout sacrifié, mais pour Dieu.
Pas
plus que les héros authentiques, les saints canonisés n'ont été très
nombreux. Et pourtant, chacun dans leur genre, avec la force du
Saint-Esprit, ils ont changé le monde, entraînant les hommes vers le
bien par leur action et par leur exemple, devenant des modèles et des
inspirateurs, encourageant les plus faibles, suscitant des imitateurs.
Car
ce n'est pas le nombre qui fait l'efficacité, mais plutôt la
détermination, le don total de soi soutenu par la grâce. Souvenons-nous
des débuts de l'Église. Ils n'étaient que douze Apôtres, ignorants,
pauvres, effrayés. Mais parce qu'ils aimaient Notre-Seigneur
Jésus-Christ plus que tout, et que celui-ci leur avait ordonné de
convertir le monde, ils sont partis confiants et sans peur. C'est ainsi
que la face du monde a été changée, que l'Église catholique a été
établie sur toute la terre.
Si nous reprenons l'histoire de l'Église, nous constaterons qu'il en a été ainsi de siècle en siècle. Lorsque, selon le mot de saint Jérôme,
le monde gémissait de se réveiller arien, l'évêque d'Alexandrie,
presque seul dans tout l'Orient, défendit la divinité du Christ malgré
les menaces, les persécutions, les exils. C'est ainsi que saint Athanase
(1) sauva la foi catholique face à la toute-puissance des empereurs
ariens. Passant dans le Languedoc et voyant des populations infectées
par le manichéisme, un chanoine d'Osma (Espagne) fut bouleversé et
entreprit de prêcher la vraie foi tant par sa parole que par ses vertus.
C'est ainsi que saint Dominique commença l'oeuvre qui
allait aboutir à la fondation de l'ordre des frères prêcheurs, et à la
disparition de l'hérésie cathare, qui ravageait le pays.
Lorsqu'une paysanne de dix-sept ans se présenta à la Cour du roi Charles VII,
alors réduit aux dernières extrémités dans sa lutte contre le roi
d'Angleterre, qui aurait pu se douter que cette intervention de sainte Jeanne d'Arc renverserait le cours de la guerre de Cent Ans ?
Nous
pourrions continuer ainsi indéfiniment. La sainteté d'une seule
personne peut transformer le monde, susciter des renouveaux que personne
n'aurait pu anticiper.
Et, tout près de nous, comment ne pas évoquer la figure de Mgr Lefebvre
? Tout était préparé pour une « révolution tranquille », « en tiare et
en chape », sans que personne ne dise mot : les conjurés avaient si bien
préparé leur coup ! Mais un homme s'est dressé, n'hésitant pas à
proclamer que ces changements n'étaient pas de Dieu, et surtout ne
craignant pas de subir des persécutions pour continuer à faire de vrais
prêtres et sauver la messe de toujours. Ce complot si bien ourdi s'est ainsi brisé sur une fidélité inébranlable, même si, hélas !, les erreurs de Vatican II continuent à faire des dégâts.
Cette
vérité nous concerne aussi. Souvent, nous sommes découragés parce que
nous sommes peu nombreux face à des ennemis formidables. Mais redisons
que le nombre ne fait pas toute l'affaire, et que la sainteté d'un seul
peut, avec la grâce de Dieu, renverser le cours des choses. Il faut donc
qu'une élite se dégage parmi nous, pour agir au coeur de la Cité, au
coeur de l'Église, et transformer le mal en bien... (Abbé Christian
Bouchacourt)
(Pour lire la suite, procurez-vous le numéro 242 de FIDELITER.)